lundi 13 janvier 2014

La sortie du dimanche - Nymph()maniac Volume I


  A part Dogville et Dancer in the Dark, je n'aime pas Lars Von Trier. Je ne l'aime pas lui, je n'aime pas la vision de la femme qu'il véhicule à travers ses films (et pourtant je suis loin d'être féministe, j'en ai juste marre qu'on passe pour des connes) et tout un tas d'autre choses que je n'aime pas non plus. Le thème de son dernier film Nymph()maniac laisser présager que je ne l'aimerais pas non plus, et rien qu'à voir la gueule de l'affiche j'aurais très bien pu partir en courant. Mais, malgré tout, il y a tout autant de petites choses que j'adore coupablement dans le cinéma de Lars Von Trier qui font que je ne peux m'empêcher d'aller voir chacune de ses nouvelles créations, quitte à détester ─ comme ce fut le cas pour son précédent film, le terriblement mauvais Melancholia. Je suis allée voir Nymph()maniac avec mes yeux d'étudiante en psycho, qui se bagarraient parfois avec mes yeux de cinéphile. A vrai dire, c'est d'ailleurs à l'étudiante que ce film a parlé, avant d'attirer la cinéphile. Mais les deux ont grandement apprécié. Je te raconte pourquoi.

Non, Nymph()maniac n'est pas un film porno, ça n'est pas le but, et si j'avais voulu voir du porno je serais restée chez moi à mater Efukt ou des reportages animaliers. Enfin, peut-être que ça en était avant que le film ne subisse une censure. Je trouve ça dingue de retirer 1h30 d'un film, tout de même. Et de ne même pas laisser le final cut au réalisateur. Mais bon. En tout cas, si tu as peur de voir des grosses bites et des scènes crues, tu peux y aller l'esprit serein car tu n'en verras rien. Ce que tu verras par contre, c'est de la poésie, et beaucoup de sensibilité. Avec beaucoup d'humour, aussi (ce qui est rare chez Lars Von Trier, alors c'est plutôt bienvenu). Ce premier volume de Nymph()maniac est découpé en cinq chapitres, faisant du film un genre de petit récit d'apprentissage, alternant entre huis-clos et flashbacks, le tout parsemé de réflexions et de métaphores filées comparant le sexe à la pêche à la mouche puis aux suites pour orgues de Bach, méditant sur l'orgasme et le chemin qui y mène avec une douceur et une poésie touchante, intellectualisant par-là les péripéties vaginales de Joe ─ le personnage principal, interprété par une Charlotte Gainsbourg convaincante, refusant notre société qui sacralise l'amour en multipliant les partenaires et s'en désintéressant aussitôt une fois son désir assouvi, telle un Dom Juan féminin.

Et puis il y a la merveilleuse photographie de Lars Von Trier, très Bergmanesque, lente et lourde de symbolisme, pleine de plans contemplatifs dont le calme et le silence se dispute à la brutalité de la bande originale, entre Rammstein et Chostakovitch. Les très jolis inserts de plans théoriques viennent contrebalancer les scènes de sexe et quelques autres, plus cruelles, celle par exemple où Uma Thurman, magistrale, campe une femme délaissée et jalouse, totalement désopilante.

Ce premier volet bien est plus soft que ce à ce quoi l'on pouvait en attendre bien que corrosif et très intelligent, et porté par une réalisation intéressante et audacieuse. La vie de Joe, chapitres 5 à 8, sera, au vu du teaser de la fin et de la progression du récit, plus radical et peut-être plus trash. En tout cas, en sortant de la salle, on se questionne sur ce que l'on a vu et ce qui va suivre. On a hâte de voir le volume II tant Lars Von Trier a sût nous tenir en éveil. Encore !


4 commentaires:

  1. J'avais envie de le voir avant ton article, et maintenant j'ai VRAIMENT envie d'aller le voir.
    J'apprécie toujours autant tes critiques ciné, plus les positives que les négatives d'ailleurs, ton intérêt est toujours clairement exprimé et tu sais trouver les arguments justes (à mon sens) pour défendre un film qui t'a plu.

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    1. Merci beaucoup, contente que mes petits avis te donnent envie de voir des films que j'ai trouvé bons ! C'est plus facile et agréable de parler d'un film qu'on a aimé que d'un que l'on a trouvé moyen, voire pas bon.

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  2. Une partie de moi aimerait réellement voir ce film - et la façon dont tu le présentes ne fait que le confirmer. Je ne suis pas forcément une grande admiratrice du travail de Lars Van Trier, et généralement ses propos et ses opinions me dérangent un peu - que ce soit au quotidien ou dans ses films, mais ton article me donne quand même envie d'y aller.

    Toutefois, vu mon rapport très particulier avec la sexualité, j'ai vraiment peur que cela me fasse plus de mal que de bien. Du coup je suis vraiment mitigée.

    Comme le dit la jeune fille au-dessus, tes critiques (positives) donnent VRAIMENT envie de voir les films dont tu parles. C'est formidable !

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    1. Effectivement, au vu de ton vécu, je ne sais pas s'il est conseillé d'aller voir ce film. Si tu as peur que ça te fasse du mal, c'est peut-être préférable de ne pas y aller. Après, il n'y a aucune scène crue, et on ne voit pratiquement rien des scènes d'amour. C'est un genre d'introspection sur ce que c'est que le sexe. A toi de voir comment tu te sens par rapport à ça, mais ça m'embêterait si jamais tu te sens mal.

      Et, merci à toi aussi alors, ça me fait plaisir !

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