jeudi 12 décembre 2013

The way I walk

 Je n'ai jamais vraiment ressenti le besoin ni trouvé d'intérêt à faire un bilan de l'année écoulée, mais 2013 a changé un tas monstrueux de choses dans ma vie, un tas tellement gros que je n'aurais jamais imaginé pouvoir changer autant ─ aussi positivement encore moins ─ en l'espace d'un an. D'ordinaire je listais simplement mi-décembre dans l'un de mes carnets quelques choses marquantes dans l'année, généralement le titre d'un film ou d'un bouquin qui m'avait bien plu, le nom d'un garçon avec lequel j'étais sortie et avec lequel ça avait plus ou moins collé pendant un temps, des petits trucs du genre pas très intéressants. Mais là, pour le coup, quand je jette un coup d'œil furtif à l'Alien d'il y a un an, je suis heureuse de constater un grand changement. Je n'étais pas malheureuse avant, loin s'en faut, mais 2013 m'a autorisé un tas de choses très positives.

 Cela fait maintenant un an (et quelques mois) que je suis à Paris. Un an que j'ai quitté ma Bretagne, mes parents, mon chat, mon foyer, mon nid douillet et pluvieux, ne revenant que ponctuellement pour les fêtes. J'ai toujours été quelqu'un de très autonome. J'ai grandi seule et mes parents m'ont toujours laissée gérer ma propre vie. Monter seule à Paris m'a permis de m'épanouir pleinement dans mon autonomie, de devenir mon propre maître. C'est devenu à moi de tout gérer, de  tout choisir : ce que j'allais manger au dîner, si j'allais me coucher à 3h du matin après avoir regardé la trilogie Jurassic Park en mangeant une pizza que je me serais faite livrée, me lever à midi, m'organiser, sécher un cours, m'arranger pour le rattraper un autre jour, gérer mon argent pour le mois, devenir plus responsable, plus consciencieuse. Peut-être plus adulte aussi, quelque part, même s'il s'agit de quelque chose qui m'effraie cruellement. Parce que cette année, j'ai grandi. Et dans le même temps, j'ai réalisé que grandir était exactement la chose que je souhaitais le moins au monde.

 Cette année, je me suis découvert un but dans la vie. J'ai rencontré une quantité phénoménale de personnes, toutes très différentes les unes des autres, certaines pas très fréquentables, d'autres merveilleuses. Au contact de chacune d'elles, j'ai appris, j'ai découvert, j'ai aimé, j'ai même souffert. J'ai fait la connaissance de sentiments que je n'avais jamais ressentis auparavant, la plupart d'entre eux n'étant pas très positifs certes, mais faisant tout de même partie de cet incroyable panel d'émotions que nous sommes capables d'éprouver. Et au travers de ces découvertes, de ces personnes et de tout mon ressenti, je me suis dit que mon unique but dans la vie est de m'accomplir en tant qu'être humain. M'élever, m'épanouir. C'est une pensée que je n'aurais jamais été capable d'avoir toute seule il y a un an. Cette année, je me suis particulièrement élevée spirituellement. Ça n'est pas le plan qui m'intéresse le mieux dans ma vie, mais pour commencer ça m'a été bien utile et en abolissant les restes de cette culture chrétienne dans laquelle j'aurais peut-être préféré ne pas baigner du tout, en m'ancrant dans des croyances et des rites me correspondant bien mieux, je me suis sentie incroyablement légère. Je crois que l'on vit tous avec notre petit lot de briques, de choses lourdes, moches et étouffantes desquelles ont aimerait se désaliéner. En larguant dernièrement la brique des traditions, c'est d'un poids notable dont je me libère. S'accomplir en tant qu'être humain, c'est aussi savoir larguer ses parpaings. Je suis assez triste de n'avoir pas eu plus tôt cette sagesse ; S'épanouir et s'élever, c'est l’œuvre d'une vie, j'ai déjà perdu dix-neuf ans et ça n'est que maintenant que je me réveille. Mieux vaut tard que jamais, comme le dit l'adage. Paradoxalement, en découvrant mon but, j'ai aussi découvert ma peur. Autrefois, je ne craignais rien. Je n'avais peur de strictement rien, ne redoutait ni le noir ni les grosses bestioles, ni la mort ni les clowns, ni rien du tout. Je ne sais pas si c'était une force ou de l'inconscience totale. Aujourd'hui je ne tremble toujours devant rien. Sauf devant l'idée de grandir. En expérimentant pendant toute cette année l'autonomie et la liberté, j'ai réalisé que je devenais quelqu'un de mature, plus consciente de ce que c'est que cette chose que la vie. Et ça, c'est foutrement effrayant. Je n'ai pas envie de grandir, de devenir une adulte, d'avoir des diplômes, de travailler, de gagner de l'argent et de faire un prêt pour m'acheter un appartement. Le problème, c'est qu'être adulte peut aussi permettre de s'accomplir un peu plus en tant qu'être humain. Cette année donc, même si j'ai réussi à me détacher de pas mal de fardeaux, en prenant conscience de mon angoisse j'en ai gagné un autre. Je veux croire que ça n'est peut-être pas une si mauvaise chose au final.
Mais j'ai encore le temps avant de devenir adulte. Cette année, j'ai aussi changé d'université, intégrant l'institut que je rêvais de fréquenter. Maintenant que j'y suis, mon projet d'avenir (même si ça m'effraie) prend peu à peu forme. J'ai essayé et vu différentes choses, le très chouette stage que j'ai eu la chance de décrocher cet été m'a ouvert un horizon tandis que discuter avec certains de mes profs m'en a ouvert d'autres. Je sais à peu près où je vais, et même si j'ai peur de grandir, c'est un peu plus rassurant de savoir où l'on va. Surtout quand là on où veut aller, c'est dans un genre d'endroit qui peut presque te permettre de rester un enfant pour toujours : quelque part où tu vis tes passions. Parce que tes passions te permettent encore d'être heureux et de t'émerveiller, ce qui est bien le propre des enfants.

 En plus d'avoir un but, un tas de poids en moins et quelques autres en plus, 2013 m'a permis d'avoir une vie sociale. Tu rigoles, mais c'est quelque chose que je n'avais pas vraiment connu jusqu'à lors. Je n'ai jamais eu d'ami, toujours beaucoup de potes, de camarades, de copains. Mais pas d'ami. Sauf un, mais j'ai toujours eu le chic pour m'attacher à des personnes vivant à des centaines de kilomètres de moi. Et avoir des amis, c'est juste merveilleux. Mes amis et moi, on ne se connait finalement que depuis un an, même un peu moins. Mais y a des gens comme ça pour qui tu es frappé d'un coup de foudre amical inexplicable, avec lesquels tu tisses des liens tellement forts que ça te met les larmes aux yeux rien que d'y penser quand tu écris ces mots. Et c'est hyper précieux, un ami. C'est sûrement très con, mais j'ai toujours vu le concept d'amitié comme un vaste jardin dans lequel chaque plante symbolise une relation. Une plante, ça a besoin d'eau, de lumière et d'espace pour grandir, se développer, fleurir et parfois donner des fruits. J'ai trop souvent cru connaitre des débuts de floraisons pour me retrouver finalement seule à entretenir une plante qui somme toute, fana. Mais là, il y a plusieurs belles plantes qui poussent dans un coin du jardin, elles sont très différentes mais elles poussent bien parce qu'elles sont entretenues avec beaucoup de soin et d'amour. Ouais c'est mièvre, mais dis-toi qu'en écrivant ça j'en suis émue aux larmes. Moque toi si tu veux, mais si toi aussi t'as des amis pour qui tu serais prêt à tuer s'ils te le demandaient, tu comprendras.
J'ai fréquenté pas mal d'hommes cette année également. Plus que d'habitude. Ça aussi ça a contribué à faire un petit chemin sur la voie de l'épanouissement. Ça m'a appris des sentiments dont je n'avais jamais encore fait l'expérience : l'absence, l'abandon, la haine. C'est aussi en souffrant que l'on apprend. L'élévation n'est certainement pas quelque chose de facile et d'agréable uniquement. La vie n'est pas qu'agréable. Et je ne regrette aucune de mes expériences. C'est sacrément triste, le regret.

 En 2013 j'ai juste commencé à réfléchir par moi-même. Je n'avais jamais eu cette sagesse ni le courage de fournir cet effort. On nous demande sans arrêt de faire des choix, de décider de ce que l'on préfère, d'avoir un avis sur un tas de sujets auxquels on n'a pas toujours réfléchi. Et souvent, on ne répond pas ce que l'on pense : on répond ce que l'on a entendu répondre, inconsciemment ou non. Je n'ai pas essayé d'avoir un avis sur tout, c'est impossible, mais j'ai décidé de réfléchir à ce que je pense, dis et crois vraiment, sans craindre de ne pas savoir, de n'avoir pas d'avis. En 2013 j'ai décidé de mettre fin à ma stupidité, de me réveiller. J'ai somnolé pendant toute ma vie, maintenant je me réveille enfin.
Un ami cher de longue date que j'avais un peu perdu de vue et retrouvé il y a peu, trouvait cependant que je n'avais pas changé. Il doit avoir raison. Sur la forme je ne suis plus la même, ma vision du monde et mon approche des choses s'est modifiée, mais dans le fond, je n'ai pas changé : je suis toujours la même Alien, treize ans d'âge mental, avec une curiosité intarissable et friande de concours de rots.

Vivement que l'on voit ce que 2014 nous réserve.

11 commentaires:

  1. Ahah je me suis retrouvé en larme aussi (bon l'approche des partiels n'aide pas vraiment) comme d'habitude ce que tu écris est vraiment magnifique, et d'un certain point de vue je t'envie.
    Je n'arrive pas à expliquer à mes parents pourquoi parfois j'ai envie de vivre seule, non pas que je sois malheureuse chez eux, mais ça me prive de choix, et ça force à rester dans l'habitude et les traditions. (On a toujours fait comme ça quoi) Et ça empêche de s'épanouir.. (et accessoirement je vis pas du tout ma vie d'étudiante.. >_> et c'est un peu dommage je trouve car je pense que c'est là que l'on commence réellement à vivre..) C'est con mais avec cet environnement je n'arrive pas à prendre mon chemin dans mon coin, même si j'ai envie de me créer mes propres traditions qui me parlent!

    2013 n'a pas été une très bonne année pour moi (émotionnellement,physiquement, et euh famillialement..?), et j'ai comme toi découvert une peur encore plus grande que toutes les autres (oui car moi je suis une tapette devant les insectes) grandir..Mais d'un autre côté j'ai trouvé un but, je sais ce que je veux réaliser et j'ai hâte d'être à ce moment de ma vie pour me dire que finalement j'en suis capable.
    J'ai souris en lisant ta phrase "Moque toi si tu veux, mais si toi aussi t'as des amis pour qui tu serais prêt à tuer s'ils te le demandaient, tu comprendras." car j'ai toujours pensé qu'il vallait mieux être suele que mal accompagnée, mais en fait après avoir rencontré ses vrais amis je pense qu'être seul est vraiment la chose la plus dure.Après m'être retrouvé seule autant de fois, ça fait du bien de pouvoir se reposer sur des gens. En fait ça doit être le point positif de 2013!

    J'attends 2014 avec impatience en espérant que le sort soit avec moi XD (enfin j'attends surtout 2015!)

    Bon allez j'arrête de pleurer les larmes sur ma peau défoncée ça brûle xD

    Bisous poulette ! ♥

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    1. Roooh, c'est pas à cause de mon article les larmes, j'espère ?
      Merci, mais tu sais, quand j'écris, c'est généralement en étant très fatiguée, vers 3h du matin. A cette heure et dans cet état-là, il semblerait qu'on soit un peu plus fragile et apte à se livrer. Je crois.

      Je pense que ton envie de vivre seule est tout à fait normale, surtout à notre âge. Rester vivre avec sa famille est certainement un peu entravant, mais j'ai envie de croire qu'il est quand même possible de s'épanouir d'une façon ou d'une autre en attendant de prendre son autonomie (et encore là tu vois, je ne suis pas exactement autonome, je dépend encore des sous de papa et maman, et actuellement j'en suis à crever de faim et à survivre aux pâtes et aux haricots verts ; Le foyer et les bon petits plats de maman me manquent sacrément dans ces moments-là, et c'est moi qui t'envie pour encore pouvoir profiter de la bonne cuisine de tes parents).

      Je suis persuadée que 2013 n'a pas été une année si mauvaise que ça pour toi et tu le dis toi-même : en 2013 tu as non seulement pris conscience d'une peur (et ça, c'est tout bénef, parce que le pire c'est d'avoir peur mais de ne pas savoir de quoi. Maintenant que tu connais ton ennemi, tu es en mesure de lutter contre), mais en plus des liens sociaux et amicaux se sont créés, resserrés, étoffés et ça, ça n'a pas de prix ("mais pour tout le reste, il y a Mastercard").

      J'espère que 2014 te sera favorable et pleine de love et de poneys.
      Et, oui, arrête de pleurer. Surtout devant mes articles. Sinon après je ne vais plus oser écrire °°"

      (。・ω・。)ノ♡

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  2. Je trouve ça formidable de pouvoir faire un bilan positif et aussi complet au bout du compte. Même si c'est un exercice pas toujours réjouissant cela permet de se rendre compte du chemin parcouru et c'est fantastique. Il y a tellement de choses qui évoluent en un an, même si on pourrait croire que non...

    Je te souhaite encore plus de découvertes, de beauté, et d'amour pour 2014 ! Que tu puisses t'épanouir d'avantage, que tu puisses profiter de tes amis aussi longtemps que possible, et j'en passe. C'est un peu tôt pour les vœux, mais bon, je prends l'adage à l'envers, mieux vaut tôt que pas du tout !

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    1. Les bilans, c'est chouette. Qu'ils soient positifs ou négatifs, essayer de prendre un peu de recul sur soi fait toujours avancer. Et effectivement, c'est fou le nombre de trucs qui changent en un an.

      Merci beaucoup pour tes vœux, j'espère également que 2014 te sera clémente et riche en nouvelles expériences cools !

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  3. Cette année à sûrement été celle des changements pour beaucoup de monde. C'est uns constatation que je fais tout autour de moi, parmi mes contacts de la toile et j'en passe. Cela laisse-t-il supposer que quelque chose de plus grand se prépare à l'horizon? J'aime à le croire!

    Ton parcours me fait penser à celui d'une ami très chère ( et le mot est faible) qui à quitter sa Reunion natale pour conquérir la capitale française. Elle y a fait de nombreuses découvertes et connu beaucoup de changement. Ces expériences ne l'ont pas faite grandir car son vécu passé s'en était déjà chargé. Paris lui aura surement appris le bonheur et l'autonomie, elle a put développer sa passion auprès de la communauté GL , mais aussi mûrir ses projets. Quand on sait d’où elle vient, c'est simplement un pas de géant.

    Je te souhaite d'avoir autant d'épanouissement et que cela ne cesse jamais.

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    1. Désolé pour les fautes de frappe, je suis claqué -__-' ( shame on me)

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    2. C'est possible en effet que 2013 ait été l'année du changement, c'est aussi quelque chose que j'ai pu remarquer. Je ne sais pas ce que ça laisse présager, mais j'ai hâte de voir la suite !

      J'imagine bien que le changement pour ton amie réunionnaise n'a pas dût être évident, a fortiori quand il s'agit de passer d'un environnement et d'une culture à quelque chose de très différent. Le changement apporte toujours son lot de tares comme de joies et c'est très chouette si elle a sût s'épanouir dans son nouveau quotidien.

      Merci, et que 2014 te prévienne des fautes de frappe, haha !

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  4. C'est un beau texte plein d’honnêteté et de réflexion. Grandir, un mot qui effraie pour sûr car on croit qu'on grandit seul mais tes mots prouvent qu'on ne grandit qu'accompagné de connaissances, d'amis ou de simples inconnus.
    Une simple phrase peut nous pousser à changer, réfléchir et remettre tout en question.
    J'imagine fort bien comment Paris a pu te faire changer, être loin de son nid douillet, de tout, et pourtant faire de ce lieu son chez soi transforme et t'a sûrement rendu adulte et encore plus mature (je suis sûre que tu l'étais avant ;) ) Je comprends bien cela étant loin de tout cette année, encore plus loin qu'on puisse se l'imaginer.

    Je te souhaites tout mes voeux pour 2014, une nouvelle année, de nouvelles aventures!
    En espérant avoir l'occasion de te parler durant cette année future.

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    1. Merci beaucoup pour ton commentaire et tes vœux qui me font très plaisir, j'espère que cette nouvelle année t'apportera également son lot de jolies choses !

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  5. Super article comme toujours, j'aime lire ton écriture et ton blabla qui fait toujours réfléchir ! <3

    Et j'aime beaucoup la métaphore des plantes pour l'amitié, je trouve ça trop chou ! *w*

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    1. Héhé, merci Tro-Tro ! Je suis contente que mon blabla te soit agréable à lire et que mes métaphore te plaisent :')

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